
"Après moi le déluge", cette expression pourrait à elle seule résumer l'attitude humaine face à l'exploitation incontrôlée de notre planète ces dernières décennies. Comment ne pas regarder en face la catastrophe arriver ? Ou comment la minimiser pour satisfaire nos besoins égoïstes ? C'est ce que propose de raconter ce court-métrage. L'ironie avec laquelle Christoph Hertel aborde le dilemme de la prise de conscience écologique vous sera palpable tout au long du film.
Dans sa parabole, Christoph Hertel réduit l'enjeu mondial à l'échelle d'un petit village montagnard ancré dans ses traditions, qui s'apprête à célébrer une fête importante pour la communauté. Cependant, l'ombre du barrage vieillissant surplombe le bourg, et il ne semble y avoir que Franz, tout juste de retour au village, qui semble s'en inquiéter.
S'improvisant lanceur d'alerte, Franz milite pour l’ouverture des vannes du barrage afin de soulager la structure et éviter l'effondrement, au risque de gâcher une partie de la fête. C'est alors qu'il se heurte à un barrage démesurément plus imposant, celui de l'absurdité humaine.

Une épée de Damoclès plane au-dessus des habitants, mais eux préfèrent la technique de l'autruche plutôt que de résoudre le problème. L'absurdité de l'histoire se mélange avec celle des dialogues, ponctués par une lenteur maîtrisée, et offre un cocktail déroutant rappelant l'esthétique de certains films du suédois Roy Andersson.
On refuse de voir le problème, on le minimise, alors que la catastrophe surplombe littéralement tout le village. On dit que le barrage a toujours été comme cela, alors pourquoi s'inquiéter ? Ou pire, on fait savoir que l'on est d'accord, mais on refuse de changer nos plans. Après tout, que serait la fête sans le manège ? Que deviendrait le boucher s'il ne pouvait pas vendre ses 800 saucisses ?
Alors les villageois regardent Franz de travers et on colmate la gigantesque brèche avec trois cuillères de plâtres pour lui faire plaisir. Mais dissimulée, la faille ne sauvera que les apparences et non le village. On somme Franz de se calmer, son agitation fait tache parmi la foule sage autour du manège. Alors, face à l'entêtement du jeune homme, on préfère se débarrasser de lui plutôt que de continuer à l'écouter. Et ce, même si l'on entend doucement le barrage céder.
Avec "Après moi le déluge", Christoph Hertel nous offre une histoire simple qui va droit au but. Le barrage a peut-être toujours été comme ça, mais les gens commencent enfin à voir la faille béante qui le traverse.
