
La société fait violence à l’individu. Comment Amy, le personnage principal, peut-elle à seulement onze ans devenir la femme qu’elle aspire à être si chacun des modèles féminins qu’on lui impose la blesse dans son intégrité ?
D’un côté, il y a la famille sénégalaise : sa mère qui accepte douloureusement la polygamie du père, sa tante qui lui apprend à tenir un foyer. De l’autre, il y a les mignonnes : les copines de l’école qui dansent le dancehall en petite tenue après les cours. Si les corps dénudés peuvent d’abord apparaître comme une libération de la féminité, contrairement au voile religieux et aux discours sexistes prononcés pendant le temps de prière (le montage les mettant en parallèle), le spectateur fait rapidement face aux dangers de la représentation féminine dictée par la culture capitaliste occidentale. Puisque ce que les mignonnes copient, ce sont les danseuses présentes dans les clips de rap qui n’apparaissent sur nos écrans que pour assouvir les fantasmes sexuels des chanteurs masculins et pour témoigner de leur capital de virilité et de domination. Le clip musical est d’abord un objet commercial avant de servir l’intérêt artistique de l’œuvre, puisqu’il sert originellement à promouvoir la vente de la nouvelle chanson. Dans ce genre de clip, la femme est réduite à un corps-marchandise extrêmement diffusé, devenant parfois, un modèle de féminité pour les plus jeunes.
D’un côté, il y a la famille sénégalaise : sa mère qui accepte douloureusement la polygamie du père, sa tante qui lui apprend à tenir un foyer. De l’autre, il y a les mignonnes : les copines de l’école qui dansent le dancehall en petite tenue après les cours. Si les corps dénudés peuvent d’abord apparaître comme une libération de la féminité, contrairement au voile religieux et aux discours sexistes prononcés pendant le temps de prière (le montage les mettant en parallèle), le spectateur fait rapidement face aux dangers de la représentation féminine dictée par la culture capitaliste occidentale. Puisque ce que les mignonnes copient, ce sont les danseuses présentes dans les clips de rap qui n’apparaissent sur nos écrans que pour assouvir les fantasmes sexuels des chanteurs masculins et pour témoigner de leur capital de virilité et de domination. Le clip musical est d’abord un objet commercial avant de servir l’intérêt artistique de l’œuvre, puisqu’il sert originellement à promouvoir la vente de la nouvelle chanson. Dans ce genre de clip, la femme est réduite à un corps-marchandise extrêmement diffusé, devenant parfois, un modèle de féminité pour les plus jeunes.

Le sujet du film est très puissant, car il touche à un tabou bien ancré dans notre réalité : la sexualisation précoce des pré-adolescentes. Outre certaines exigences scénaristiques dont la réalisatrice ne parvient pas à s’affranchir et qui constituent le ventre mou du film (la construction de l’amitié entre Amy et Angelica, les disputes d’écolières…), Mignonnes s’empare réellement de la force de son sujet lorsqu’il laisse les images parler d’elles-mêmes. La scène de chorée dans les escaliers est un moment extrêmement fort grâce au montage des différentes caméras que choisit d’effectuer la réalisatrice. La séquence démarre du point de vue du téléphone qui les filme en contre-plongée, on les voit se hâter de se positionner. Puis lorsque la musique démarre, le point de vue change et la caméra les filme au plus près de leurs visages et de leur corps. Les regards caméra langoureux, un doigt dans la bouche, les fesses qui descendent au sol et qui remontent : voilà l’imagerie du clip de rap. L’œil du spectateur fait lui-même le rapprochement tant l’image a un héritage fort. Pas besoin de parallèle dans le montage, le dérangement provoqué par la ressemblance entre ces gamines et les femmes présentes dans les clips est puissant ; les images débordent de sens. La séquence se termine dans le téléphone de l’héroïne, heureuse des likes comme récompense, témoignant de sa motivation à imiter les chorégraphies sensuelles.
Les images parlent donc d’elles-mêmes puisqu’elles invoquent l’héritage représentatif des corps qu’elles filment. On préférera dans ce film ce genre mise-en-scène plus consciente et au plus près des images qu’elle invoque et qu’elle dénonce, plutôt que certains parallèles plus évidents et moins stimulants pour le spectateur (comme cette séquence certes tout à fait délicieuse mais moins surprenante d’Amy regardant des vidéos de twerk sous son voile pendant la prière).
Le film terminé, on n’hésitera pas à dire que, malgré des moments parfois inégaux, Maïmouna Doucouré a toutes les facettes d’une grande réalisatrice en devenir (Mignonnes étant son premier long-métrage). Car même dans ses envolées narratives, Doucouré n’hésite pas à être radicale pour profiter au maximum l’intensité dramatique de son personnage en détresse. Pourquoi Amy photographie-t-elle son sexe et le publie-t-elle ensuite sur les réseaux ? C’est une action très étrange, mais forte de sens. Le personnage prend des allures très mystérieuses qui nous mettent presque à distance avec lui. On croit la perdre complétement lorsque possédée, son corps twerke à la folie sous les incantations exorcisantes de la musique africaine. Et finalement, c’est un bonheur de la retrouver lorsqu’elle s’envole dans les airs et qu’elle nous signifie toute la vie qui subsiste en elle. Là, elle incarne un personnage puissant, ce n’est plus une petite fille, elle est devenue une femme, un modèle.
Les images parlent donc d’elles-mêmes puisqu’elles invoquent l’héritage représentatif des corps qu’elles filment. On préférera dans ce film ce genre mise-en-scène plus consciente et au plus près des images qu’elle invoque et qu’elle dénonce, plutôt que certains parallèles plus évidents et moins stimulants pour le spectateur (comme cette séquence certes tout à fait délicieuse mais moins surprenante d’Amy regardant des vidéos de twerk sous son voile pendant la prière).
Le film terminé, on n’hésitera pas à dire que, malgré des moments parfois inégaux, Maïmouna Doucouré a toutes les facettes d’une grande réalisatrice en devenir (Mignonnes étant son premier long-métrage). Car même dans ses envolées narratives, Doucouré n’hésite pas à être radicale pour profiter au maximum l’intensité dramatique de son personnage en détresse. Pourquoi Amy photographie-t-elle son sexe et le publie-t-elle ensuite sur les réseaux ? C’est une action très étrange, mais forte de sens. Le personnage prend des allures très mystérieuses qui nous mettent presque à distance avec lui. On croit la perdre complétement lorsque possédée, son corps twerke à la folie sous les incantations exorcisantes de la musique africaine. Et finalement, c’est un bonheur de la retrouver lorsqu’elle s’envole dans les airs et qu’elle nous signifie toute la vie qui subsiste en elle. Là, elle incarne un personnage puissant, ce n’est plus une petite fille, elle est devenue une femme, un modèle.
