Soudain, alors que l’on sort de la projection de l’absurdisme et hilarant Dain de Quentin Dupieux, on est mis face à une réalité déjà connue. On sait ce qu’il se passe là-bas, par des mots et des articles de journaux. Mais le conflit dure, preuve que les mots ne suffisent pas, ou plus. Alors vient le temps des images, des images émouvantes et des images-chocs.
Ça a été la plus grande claque du Festival de Cannes 2019. Un documentaire à l’engagement politique et social dont la puissance n’a d’égale que l’ovation spectaculaire qui a accueilli sa co-réalisatrice.
Né de la volonté de Waad al-Ka- teab de raconter en images le soulèvement populaire syrien, le film compile les vidéos qu’elle a enregistréés tout au long des événements. D’abord au smartphone puis au caméscope, elle s’est ensuite associée au réalisateur anglais Edward Watts pour le montage.
Les Syriens ne sont plus des nombres ni un terme générique. Ce sont Waad, Hamaz, et bien sûr, Sama. Ce ne sont plus des morts en quantité inappréciable, mais des rires et des larmes enfouis sous les gravats.
Des rires oui, car ces gens réussissent à garder le sourire. À faire des blagues sur les bombardements, à garder la foi d’un engagement plusieurs années durant, jusqu’au moment où l’on ne peut plus combattre, jusqu’au moment où la mort est imminente pour tous... Et c’est à ce moment-là, et uniquement à ce moment-là, qu’ils prennent la décision de partir. Le couple Waad - Hamaz reste fidèle à la révolution du début à la fin, en passant par les bombardements et les armes chimiques. Malgré leur fille Sama tout juste née et la seconde grossesse de Waad.
Alors oui, on nous dira que ce n’est pas chez nous, qu’on ne peut rien faire à notre échelle. Peut-être. Mais la situation exige un effort et le but de la projection n’était pas de nous faire prendre les armes. Mais plutôt de nous faire crier, pleurer, de nous indigner. Et, tout simplement, de nous faire rejeter cette humanité.
Il est tout bonnement impossible de rester impassible devant ce film. Voir en direct la mort de cinq personnes sur la caméra de vidéo-surveillance d’un hôpital bombardé, ou d’autres scènes encore plus dérangeantes, ne laissent de marbre que tous ces morts sacrifiés sur l’autel de la haine.
Indignez-vous! Comme dirait Stéphane Hessel. Alors, foncez regarder ce film, c’est peut-être votre seule occasion de voir une fillette de deux ans vous expliquer ce qu’est une bombe à fragmentation.
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